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Ephémères révisions de la 1ère ES 2 - EAF
17 juin 2013

[Ecrit] Représentation du comique --> problématique et plan du commentaire

 

L'exercice est simple : trouvez une problématique et un plan de commentaire pour le texte suivant, extrait du Mariage de Figaro de Beaumarchais. 

A ce moment de l'acte III, le comte Almaviva cherche à se venger de Figaro par tous les moyens : il joue donc de tout son poids pour que l'issue du procès opposant Marceline et Figaro penche en faveur de la première et que Figaro, au lieu d'épouser Suzanne sa bien-aimée, soit obligée d'épouser cette femme. 

 

Extrait de l'acte III, scène 15

Les Acteurs précédents, Antonio, les Valets du château, les paysans et paysannes en habits de fête ; le Comte s’assied sur le grand fauteuil ; Brid’oison, sur une chaise à côté ; le Greffier, sur le tabouret derrière sa table ; les Juges, les Avocats, sur les banquettes ; Marceline, à côté de Bartholo ; Figaro, sur l’autre banquette ; les Paysans et Valets, debout derrière.

[...]

Double-Main lit.

« … Pour cause d’opposition faite au mariage dudit Figaro par ladite de Verte-Allure. Le docteur Bartholo plaidant pour la demanderesse, et ledit Figaro pour lui-même, si la cour le permet, contre le vœu de l’usage et la jurisprudence du siège. »

Figaro

L’usage, maître Double-Main, est souvent un abus. Le client un peu instruit sait toujours mieux sa cause que certains avocats, qui, suant à froid, criant à tue-tête, et connaissant tout, hors le fait, s’embarrassent aussi peu de ruiner le plaideur que d’ennuyer l’auditoire et d’endormir messieurs : plus boursouflés après que s’ils eussent composé l’Oratio pro Murena. Moi, je dirai le fait en peu de mots. Messieurs…

Double-Main

En voilà beaucoup d’inutiles, car vous n’êtes pas demandeur, et n’avez que la défense. Avancez, docteur, et lisez la promesse.

Figaro

Oui, promesse !

Bartholomettant ses lunettes.

Elle est précise.

Brid’oison

I-il faut la voir.

Double-Main

Silence donc, messieurs !

L’Huissierglapissant.

Silence !

Bartholo lit.

« Je soussigné reconnais avoir reçu de damoiselle, etc. Marceline de Verte-Allure dans le château d’Aguas-Frescas, la somme de deux mille piastres fortes cordonnées, laquelle somme je lui rendrai à sa réquisition, dans ce château ; et je l’épouserai, par forme de reconnaissance, etc. Signé Figaro, tout court. » Mes conclusions sont au paiement du billet et à l’exécution de la promesse, avec dépens. (Il plaide.) Messieurs… jamais cause plus intéressante ne fut soumise au jugement de la cour ; et, depuis Alexandre le Grand, qui promit mariage à la belle Thalestris…

Le Comteinterrompant.

Avant d’aller plus loin, avocat, convient-on de la validité du titre ?

Brid’oisonà Figaro.

Qu’oppo… qu’oppo-osez-vous à cette lecture ?

Figaro

Qu’il y a, messieurs, malice, erreur ou distraction dans la manière dont on a lu la pièce, car il n’est pas dit dans l’écrit : « laquelle somme je lui rendrai, ET je l’épouserai, » mais « laquelle somme je lui rendrai, OU je l’épouserai » ; ce qui est bien différent.

Le Comte

Y a-t-il ET dans l’acte, ou bien OU ?

Bartholo

Il y a ET.

Figaro

Il y a OU.

Brid’oison

Dou-ouble-Main, lisez vous-même.

Double-Mainprenant le papier.

Et c’est le plus sûr ; car souvent les parties déguisent en lisant. (Il lit.) « E, e, e, Damoiselle e, e, e, de Verte-Allure, e, e, e, Ha ! laquelle somme je lui rendrai à sa réquisition, dans ce château… ET… OU… ET… OU… » Le mot est si mal écrit… il y a un pâté.

Brid’oison

Un pâ-âté ? je sais ce que c’est.

Bartholoplaidant.

Je soutiens, moi, que c’est la conjonction copulative ET qui lie les membres corrélatifs de la phrase ; je payerai la demoiselle, ET je l’épouserai.

Figaroplaidant.

Je soutiens, moi, que c’est la conjonction alternative OU qui sépare lesdits membres ; je payerai la donzelle, OU je l’épouserai. À pédant, pédant et demi. Qu’il s’avise de parler latin, j’y suis grec ; je l’extermine.

Le Comte

Comment juger pareille question ?

Bartholo

Pour la trancher, messieurs, et ne plus chicaner sur un mot, nous passons qu’il y ait OU.

Figaro

J’en demande acte.

Bartholo

Et nous y adhérons. Un si mauvais refuge ne sauvera pas le coupable. Examinons le titre en ce sens. (Il lit.) « Laquelle somme je lui rendrai dans ce château, où je l’épouserai. » C’est ainsi qu’on dirait, messieurs : « Vous vous ferez saigner dans ce lit, où vous resterez chaudement » ; c’est dans lequel. « Il prendra deux gros de rhubarbe, où vous mêlerez un peu de tamarin » ; dans lesquels on mêlera. Ainsi « château où je l’épouserai », messieurs, c’est « château dans lequel. »

Figaro

Point du tout : la phrase est dans le sens de celle-ci : « ou la maladie vous tuera, ou ce sera le médecin » ; ou bien le médecin ; c’est incontestable. Autre exemple : « ou vous n’écrirez rien qui plaise, ou les sots vous dénigreront » ; ou bien les sots ; le sens est clair ; car, audit cas, sots ou méchants sont le substantif qui gouverne. Maître Bartholo croit-il donc que j’aie oublié ma syntaxe ? Ainsi, je la payerai dans ce château, virgule, ou je l’épouserai…

Bartholovite.

Sans virgule.

Figarovite.

Elle y est. C’est, virgule, messieurs, ou bien je l’épouserai.

Bartholoregardant le papier, vite.

Sans virgule, messieurs.

Figarovite.

Elle y était, messieurs. D’ailleurs, l’homme qui épouse est-il tenu de rembourser ?

Bartholovite.

Oui ; nous nous marions séparés de biens.

Figarovite.

Et nous de corps, dès que mariage n’est pas quittance. (Les juges se lèvent et opinent tout bas.)

Bartholo

Plaisant acquittement !

Double-Main

Silence, messieurs !

L’Huissierglapissant.

Silence !

Bartholo

Un pareil fripon appelle cela payer ses dettes !

Figaro

Est-ce votre cause, avocat, que vous plaidez ?

Bartholo

Je défends cette demoiselle.

Figaro

Continuez à déraisonner, mais cessez d’injurier. Lorsque, craignant l’emportement des plaideurs, les tribunaux ont toléré qu’on appelât des tiers, ils n’ont pas entendu que ces défenseurs modérés deviendraient impunément des insolents privilégiés. C’est dégrader le plus noble institut. (Les juges continuent d’opiner bas.)

Antonioà Marceline, montrant les juges.

Qu’ont-ils tant à balbucifier ?

Marceline

On a corrompu le grand juge ; il corrompt l’autre, et je perds mon procès.

Bartholobas, d’un ton sombre.

J’en ai peur.

Figarogaiement.

Courage, Marceline !

Double-Main se lève ; à Marceline.

Ah ! c’est trop fort ! je vous dénonce ; et, pour l’honneur du tribunal, je demande qu’avant faire droit sur l’autre affaire, il soit prononcé sur celle-ci.

Le Comte s’assied.

Non, greffier, je ne prononcerai point sur mon injure personnelle ; un juge espagnol n’aura point à rougir d’un excès digne au plus des tribunaux asiatiques : c’est assez des autres abus ! J’en vais corriger un second, en vous motivant mon arrêt : tout juge qui s’y refuse est un grand ennemi des lois. Que peut requérir la demanderesse ? mariage à défaut de paiement : les deux ensemble impliqueraient.

Double-Main

Silence, messieurs !

L’Huissierglapissant.

Silence.

Le Comte

Que nous répond le défendeur ? qu’il veut garder sa personne ; à lui permis.

Figaroavec joie.

J’ai gagné !

Le Comte

Mais comme le texte dit : "Laquelle somme je payerai à sa première réquisition, ou bien j’épouserai, etc.", la cour condamne le défendeur à payer deux mille piastres fortes à la demanderesse, ou bien à l’épouser dans le jour. (Il se lève.)

Figarostupéfait.

J’ai perdu.

 

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